AOF : VISION & PROJET EN BREF
La filière visuelle en France est aujourd’hui organisée autour de 3 professionnels de santé, réglementés par le Code de la santé publique : l’ophtalmologiste, l’orthoptiste et l’opticien. S’ajoute à ceux-ci un 4ème professionnel, l’optométriste, qui est, quant à lui, non reconnu actuellement par ce Code.
Cette structuration de la filière se révèle sous-optimale dans la mesure où elle ne répond pas aux besoins en soins visuels actuels, et n’anticipe pas les besoins à venir grandissants. Les délais pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologiste sont, en moyenne, supérieurs à 100 jours en France, avec de très grandes inégalités selon les territoires. Les refus de nouveaux patients avoisinent les 60% (moyenne nationale).
En cause, le faible nombre d’ophtalmologistes qui sont, aujourd’hui, les seuls professionnels médicaux à couvrir l’ensemble des niveaux d’interventions, et qui ne parviennent pas à répondre à la demande de soins.
Les perspectives sont inquiétantes : les deux tiers des ophtalmologistes sont des seniors proches de la retraite, et la population française est vieillissante, avec des besoins en soins exponentiels.
La réponse proposée avec les orthoptistes n’offre pas non plus une solution efficace, puisqu’elle n’améliore pas la couverture territoriale nécessaire à l’éradication des déserts médicaux, et a souvent pour conséquence une augmentation des honoraires des ophtalmologistes.
Les nouvelles technologies, comme la télémédecine ou l’intelligence artificielle présentent des perspectives intéressantes. Néanmoins, la télémédecine demeure en France une pratique marginale. Si l’intérêt économique est évident, l’ophtalmologiste étant le seul lecteur des examens, le temps médical gagné est négligeable. Le développement de cette technologie, notamment dans les déserts médicaux nécessiterait d’élaborer une stratégie unifiée, cohérente et continue.
Le développement des compétences des opticiens, et en particulier les pratiques avancées représente une solution à ce problème. L’opticien de santé, ou l’opticien-optométriste pourrait permettre un déploiement rapide de cette solution : par sa formation de niveau bac + 5, par sa couverture du territoire (plus de 3000 diplômés d’Etat actuellement), et également par les économies que cette profession peut engendrer comparativement aux autres alternatives envisagées actuellement.
Cela a notamment été démontré dans plusieurs pays européens qui ont réglementé l’optométrie, et/ou développé les compétences des opticiens. Le meilleur exemple étant les Pays-Bas, qui se trouvaient au début des années 2000 dans une situation similaire à celle de la France aujourd’hui, et qui, suite à sa réforme, ont vu les délais d’attente diminuer de plus de 70%.
Dans ce contexte, l’Association des Optométristes de France (AOF, syndicat professionnel) mène des actions auprès des pouvoirs publics depuis plusieurs années afin de les sensibiliser sur cette problématique et sur les solutions offertes par les professions d’optométriste et d’opticien.
Malgré plusieurs succès tels que le rapport Ferrand en 2014, l’avant-projet de loi Macron en 2015, ou le rapport de la Cour des comptes en octobre 2018, qui ont mis en avant les bénéfices d’une réglementation, les optométristes exercent toujours dans un cadre inadapté, ils sont voués à l’expatriation ou à des subterfuges variés permettant leur exercice sous des montages divers. Le récent rapport de l’Inspection générale des Affaires sociales (Igas, 2020) recommande très largement un développement des compétences et de la formation des opticiens.
À la vue des perspectives catastrophiques de l’accès aux soins, l’élargissement des compétences des opticiens, et la réglementation des optométristes est la solution à effets multiples : diminution des délais d’attente en ophtalmologie, diminution du renoncement aux soins avec un professionnel de première ligne de proximité, diminution du coût pour la Sécurité Sociale, et augmentation du pouvoir d’achat pour nos concitoyens.